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Constats

Avant-propos

Les travaux présentés ici se situent au croisement de l’action révolutionnaire et d’une recherche théorique et pratique autour d’alternatives systémiques. Mon approche relève toutefois davantage de ce que l’on peut communément rattacher à la militance qu’à celle de l’intellectuel. La méthode scientifique rigoureuse tend en effet à s’intéresser d’abord au comment, pour ensuite chercher le pourquoi, tandis que je suis parti en premier lieu d’un pourquoi, pour chercher le comment.

La question, à mes yeux, n’est pas tant de savoir quelle approche serait la meilleure empiriquement, mais plutôt de percevoir, dans chacune, l’intérêt et les limites, ou encore de déterminer dans quels contextes chaque démarche serait la plus judicieuse.

Si l’on peut légitimement considérer que comprendre l’Histoire ou le monde repose davantage sur la science que sur l’imagination, lorsqu’il s’agit de créer du nouveau, je me réfère plutôt à Castoriadis : c’est au travers d’un imaginaire radical, qui met en mouvement, que l’on peut contribuer à faire advenir une Histoire nouvelle. C’est peut-être pour cette raison que Graeber s’est étonné de découvrir, à travers son expérience personnelle, que les militants avaient une longueur d’avance sur les intellectuels en matière de création d’alternatives. Mais dans chaque cas, le pourquoi et le comment restent liés, et, comme dans presque tout, il convient de jouer les équilibristes. Ou, comme le dit mieux Paulo Freire : « La pensée et l’acte forment deux pôles complémentaires qu’il ne faut pas séparer. »

En résumé, si ce qui est exposé ici peut parfois prendre la forme d’un travail intellectuel, ce qui est présenté provient en réalité en premier lieu de problématiques concrètes, rencontrées au travers de l’action révolutionnaire de terrain, issue d’un imaginaire radical.

RB.

Préambule

En chinois, le terme de « crise » se dit Wei-Ji. Littéralement, Wei-Ji se traduit par l’idée d’un moment charnière, où tout peut basculer — vers le pire comme vers le meilleur.

Nous traversons un grand nombre de crises majeures, d’ordre existentielles, tant sur le plan social, que politique, ou environnemental.

Et pendant que les populations subissent une aggravation continue de leurs conditions de vie et des inégalités, elles sont aussi privées d’un véritable espoir d’amélioration. Pour l’heure, seul le pire semble se profiler.

Si les crises ont toujours nourri la montée des extrêmes, un danger inédit s’ajoute aujourd’hui à la vieille menace totalitaire. Les avancées technologiques offriront bientôt aux détenteurs du pouvoir la capacité d’exercer un contrôle quasi absolu sur la population. Un régime totalitaire, remettant en cause l’État de droit — c’est-à-dire l’égalité des droits pour chaque citoyen — pourrait, grâce à l’intelligence artificielle et à la robotique, surveiller en permanence l’ensemble de la société et écraser toute résistance, même unie, d’une simple pression sur un bouton. Nous risquons une dystopie pire encore que celle imaginée par Orwell.

 

Face à cette situation, le fait est que nous constatons un fossé énorme entre ce que proposent nos intellectuels les plus écoutés, comme l’ensemble de nos partis traditionnels, et les aspirations profondes que nous portons collectivement.

Il y a, de toute manière, une incohérence profonde :

— D’un côté, on nous promet un marché libre, mais qui finit par concentrer le pouvoir avec la concentration extrême des capitaux. Bientôt, plus rien ne sera possible sans passer par les deep pocket investors, ces multi-milliardaires qui détiennent l’essentiel des richesses et imposent leurs propres règles du jeu, tout en invoquant la liberté.

— De l’autre, on nous promet l’équité, sous la planification étatique, mais qui se trahit sous le poids d’un pouvoir central trop fort. Rapidement, ce pouvoir devient une bureaucratie qui étouffe l’initiative et les libertés, tout en fabriquant de nouvelles élites technocratiques, elles aussi corruptibles. Cette hiérarchie finit par définir les normes, orienter la redistribution, et contrôler l’investissement selon ses propres intérêts, en continuant de se réclamer d’une prétendue bienveillance.

J’avais lu chez Zibechi que la révolution aide à la naissance d’un monde nouveau, mais qu’elle ne le crée pas. Il existe déjà, à un stade embryonnaire, et il nous faut lui permettre de grandir.

Une alternative est en train d’émerger. Elle fait l’alliance des opposés, en proposant de conjuguer l’intérêt individuel et l’intérêt collectif. Si un tel changement avait lieu, il représenterait une rupture au moins aussi importante que celle qu’a connue l’humanité il y a 10 000 ans.

Un tel changement, si radical, n’est jamais le fruit de l’imaginaire d’un seul individu, il est issu de la cohérence d’événements imprévisibles. Je me contente de mettre en lumière ce qui est déjà là.

La plus grande rupture de l'Histoire de l'humanité

Certaines inventions, comme celle de l’imprimerie, ont bouleversé le monde. Nous sommes la première génération de l’Histoire de l’humanité à disposer de tels moyens de partage et d’échange d’informations. Nos propres parents n’ont pas grandi avec internet, alors même que nos enfants pourraient difficilement éviter de vivre avec tout un monde digital. Beaucoup n’y voient encore qu’une simple avancée technologique supplémentaire. Mais ce que nous vivons en réalité, c’est l’effondrement d’un pilier qui a porté nos modes d’organisation depuis 10.000 ans : celui de la centralisation de l’information.

Si on le réalise mal, c’est d’abord parce que le phénomène est très nouveau. Aucun de nos anciens penseurs ou philosophes n’auraient su prévoir, à moins d’écrire de la science-fiction, qu’un jour les humains pourraient espérer partager une vue d’ensemble de leur sort. On peut ajouter que la raison d’être de l’Etat demeure un mystère philosophique. Mais si l’incompréhension persiste à ce point, c’est aussi que perdure une forme d’aliénation qui était encore très récemment répandue dans toutes les sphères de la vie : le culte du chef.

Pour comprendre à quel point l’effondrement d’un tel pilier bouleverse le monde, il faut comprendre son lien avec l’Histoire de nos civilisations, en remontant jusqu’au moment de sa création. Nous vivions alors dans de petites tribus, avec un fonctionnement qu’on peut qualifier d’horizontal et avec des économies du don. En petit nombre, nous n’avons pas le besoin de centraliser l’information. Tout le monde peut avoir naturellement accès aux informations. Elle se centralise un peu chez les ‘maîtres’, c’est à dire chez celles et ceux qui ont le plus de maitrise d’un sujet donné.

Nous avons ensuite vécu ce qu’on considère jusqu’à présent comme la plus grande rupture de l’Histoire de l’humanité. Nous avons changé radicalement notre manière de nous organiser, là encore probablement en raison de crises majeures. Pour les résoudre, nous avons du nous rassembler en grand nombre. Et c’est exactement à ce moment que nous avons bâti ce pilier, en même temps que nous avons créer une institution qui perdure jusqu’à aujourd’hui : un système pyramidal, notamment sous la forme d’Etat. La principe est simple : je passe l’information à mon chef, qui fera de même, jusqu’à arriver en haut de la hiérarchie. L’autorité située tout en haut est donc la seule à avoir une vue d’ensemble de la montagne.

Notons que même les Etats dits démocratiques sont des structures fondamentalement pyramidales. Ce qui différencie les démocraties des dictatures ne réside pas dans le fait que le pouvoir ne se situerait pas en haut, mais dans l’existence, ou non, de contre-pouvoirs face à l’autorité. Les démocraties sont un peu des contre-mesures à un danger qui mène aux pires dérives : celui d’un pouvoir laissé entièrement libre et sans surveillance.

Dans un essai, Asimov faisait remarquer que « les anciens, qui pensaient que la Terre était plate, avaient en grande partie raison, vu leur contexte ». Quand on voit le monde comme un endroit restreint, le considérer plat est assez juste, car la courbure de la Terre est si subtile qu’on ne la perçoit presque pas. Ce n’est que lorsqu’on réalise l’immensité réelle de la planète que cette petite courbure finit par faire toute la différence, révélant que la Terre est bel et bien ronde. Nos propres anciens avaient eux-mêmes en grande partie raison en considérant que remettre en question l’autorité était un grand mal. Depuis des millénaires, le chef est le mieux placé pour prendre les décisions, au moins en grand nombre. Comment cela aurait-il pu changer ?

Tout général sait que l’information est le premier enjeu stratégique afin de prendre de bonnes décisions. Tout joueur d’échecs connait l’importance de pouvoir savoir ce qui se passe sur l’échiquier pour avoir une chance de gagner la partie. Pourtant on ne réalise pas suffisamment que ce qui permet au joueur de foot de pouvoir décider quoi faire quand la balle est à ses pieds, c’est justement qu’il a la capacité de voir l’ensemble du terrain et l’emplacement des autres joueurs. C’est ce besoin si structurant — celui de disposer d’une vue d’ensemble pour pouvoir décider — qui a donné sa plus grande légitimité au chef pendant 10.000 ans.

Et voilà que l’humanité se découvre les moyens de partager presque tous types d’informations, presque instantanément, quelle que soit la distance qui nous sépare sur terre. Cela amène la plus grande remise en cause de l’autorité de toute l’Histoire des civilisations. Même si cela n’empêche pas certains d’être encore surpris, qu’alors même que les populations commencent pour la première fois à avoir une vue d’ensemble de l’échiquier, elles puissent avoir elles aussi envie de jouer la partie.

Nous avons vu récemment ressusciter l’horizontalité. Cela pourra surprendre de dire ça, puisque le terme lui-même est très récent. Avant, l’horizontalité c’était un mot que l’on employait uniquement pour parler d’une surface plane. Cela aurait commencé en Argentine (selon Marina Sitrin) lors des révoltes qui ont lieu dans les années 2000, mais nous avons même en France peu après sans même le savoir. Nous voulions instinctivement démarquer notre manière de nous organiser des fonctionnements dits démocratiques, même si on ne comprenait pas vraiment à l’époque les exactes différences, mise à part les choses évidentes comme la façon d’arrêter les décisions collectives. Je découvrais plus tard, grâce aux travaux de nos anthropologues, que le mode de prise de décision que nous étions en train d’employer, qu’ils appellent le consensus apparent et que l’on pensait nouveau, était en fait à la fois le plus ancien et le plus répandu de l’histoire de l’humanité.

De manière générale, une série de fonctionnements plus coopératifs ont été développés récemment, jusqu’au champ disciplinaire de l’intelligence collective. Aujourd’hui, beaucoup critiquent ces fonctionnements, tous bords politiques confondus. Mais il faut comprendre que nous parlons ici de choses très nouvelles qui sont à un stade embryonnaire. On peut difficilement reprocher à un bébé d’avoir du mal à marcher.

Revenons un peu aux sources. Quand l’humanité a vécu des crises majeures et commencé à se rassembler en grand nombre et à bâtir des civilisations, il ne nous était pas possible de reproduire nos fonctionnements. A la différence de la démocratie, les personnes concernées participaient réellement à la décision collective. Mais aucune participation équitable n’est possible sans avoir suffisamment accès aux informations liées à la décision à prendre. C’est même essentiel pour prendre de bonnes décisions d’avoir une vue d’ensemble de la situation, et la seule manière que nous avons trouvé pour faire ça en grand nombre a été de centraliser l’information en un seul point : le chef. A partir de là, il y a automatiquement création d’Etat. Et de la création d’Etat, avec cette pyramide de pouvoir, on voit apparaitre des classes dominantes et des classes dominées, mais aussi l’exploitation des individus par le pouvoir. Mais attention, tout ceci a représenté une avancée considérable qui nous a permit de bâtir nos civilisations. Nous avons aussi développé l’individualisme, avec la compétition, qui amène une forme de dépassement de soi qui pousse l’humain à sortir de sa zone de confort. Le sujet ici n’est pas de décrier une avancée humaine qui s’est imposée à raison, mais plutôt de comprendre comment avancer encore plus, pourquoi notre système arrive en bout de piste, et quelles sont les voies qui s’ouvrent à nous pour amener un nouveau monde capable de résoudre les enjeux contemporains.

Quand un pilier porteur s’effondre, c’est tout le bâtiment qui menace de s’écrouler. Ce que nos philosophes ont manqué d’expliquer, c’est qu’avec les moyens de communication dont nous disposons aujourd’hui, l’autorité centralisée a perdu sa plus grande légitimité. C’est une première historique qui remet en cause tout notre système, qui doit être entièrement repensé à la lumière des moyens contemporains. Et l’humain, instinctivement, s’oppose de plus en plus à la concentration des pouvoirs.

Le plus grand enjeu contemporain

Urfalino, dans un papier universitaire sur le consensus apparent, avait résumé les travaux de ses confrères anthropologues Terray et Abélès ainsi : « La pratique de la palabre s’effectue dans un contexte normatif d’où l’individualisme politique est absent. » Je l’ai contacté à ce sujet, et il réfute aujourd’hui ce terme, qu’il considère comme une erreur. Combien de grandes découvertes ont pourtant été le fruit d’une erreur ?

Je me souviens qu’à la lecture de cette phrase, je m’étais immédiatement posé deux questions :
— Qu’est-ce que l’individualisme politique ? Je n’avais jamais lu ou entendu ce terme.
— Et, puisque je pouvais à peu près me représenter ce que cela signifiait, comment une telle chose pouvait-elle être absente d’une société humaine ?

Comment le plus grand enjeu, d’ordre existentiel, pourrait-il être à la fois complètement et totalement ignoré par l’ensemble de l’humanité ? Il aurait fallu, pour cela, qu’il n’ait même pas de nom.

Il y a une tendance naturelle à penser que ce que l’on porte serait plus important que tout le reste. Certains nous diront que la cause première serait, par exemple, la question de l’eau. D’autres citeront les inégalités, ou l’environnement en général. Beaucoup aujourd’hui nous diront que l’enjeu central est celui de l’intelligence artificielle, ou autre. Mais quel que soit l’enjeu que ces personnes souhaitent résoudre, quel est leur plan pour y parvenir dans le monde actuel ?

Pour toutes ces questions, il apparaît que des parties isolées, en compétition systématique les unes contre les autres, ne semblent pas pouvoir les résoudre. Si une entreprise décide de mieux payer ses salariés, elle risque de faire moins de bénéfices et d’être dévorée par ses concurrentes. Si un pays décide de cesser une exploitation polluante pour la planète ou de mettre en pause l’IA, un autre s’emparera de l’occasion pour prendre l’ascendant sur lui. Les exemples sont très nombreux.

En réalité, les enjeux actuels sont le résultat d’un phénomène plus vaste que la simple addition des parties. Et les solutions nécessitent que nous puissions coopérer pour les résoudre. Certains s’imaginent qu’un gouvernement mondial serait la solution. Il suffirait ensuite de mettre en place des mesures liberticides, très coercitives, qui rejetteraient évidemment le principe d’égalité des droits des citoyens, pour n’autoriser qu’à une petite part de la population l’exploitation de telle ou telle ressource, par exemple. Mais cette alternative-là est tout sauf désirable, en plus de manquer de faisabilité et de viabilité.

Pour résoudre les grandes crises contemporaines, ce dont nous avons réellement besoin, si cela est possible, serait que chaque individu, dans ses comportements personnels, en vienne naturellement à agir dans l’intérêt de l’ensemble, sans y être forcé à aucun moment, mais plutôt motivé à le faire. Ce serait désirable, et cela pourrait nous permettre, pas à pas, de résoudre l’ensemble des enjeux contemporains. Mais on nous dira que c’est impossible, puisque l’humain, par nature, est fondamentalement égoïste.

Déjà, c’est à moitié vrai. Certes, l’humain est égoïste, mais il est aussi altruiste, comme l’expliquait Kropotkine. Nous sommes capables d’agir uniquement pour nous-mêmes, et c’est même important, mais aussi de donner pour les autres. Mais même là, on nous dira que c’est par égoïsme, ou pour la survie.

« Tout le monde sait que chaque homme, et dès l’enfance, a plutôt tendance à se considérer un peu comme le centre du monde — à ne voir autour de lui que de vagues épiphénomènes surtout gênants et dont il essaiera toute sa vie de tirer tout ce qu’il pourra au profit de sa propre subsistance. Et malheur à celui à qui survient la fâcheuse aventure de perdre ce sens-là. En réalité, l’homme est obligé, tout au long de sa vie, d’être alternativement fauve et proie ; n’étant que l’un ou l’autre exclusivement, il ne tarde pas à être éliminé du concert. »
Pierre Reverdy — Cette émotion appelée poésie

C’est en réalité plus complexe. Prenez l’exemple de l’équipe de football. Les joueurs font de leur mieux pour faire gagner leur équipe. Cela ne signifie pas qu’ils ne peuvent pas être égoïstes ou altruistes. Mais ils ont un but commun à atteindre, et chaque joueur, naturellement, fera généralement de son mieux pour que l’équipe gagne. Ils ne considèrent pas, dans leur action individuelle, qu’eux-mêmes : ils prennent en compte l’intérêt de l’ensemble. Pourquoi ?

Parce que c’est en réalité l’intérêt du joueur de faire gagner l’équipe. Quand l’équipe gagne, chaque joueur y gagne. Il n’y a pas d’antagonisme entre l’intérêt du joueur et celui de l’équipe, au contraire, ils se confondent. Le joueur n’a pas à choisir entre ce qui le fera gagner personnellement ou ce qui fera gagner l’équipe. Le joueur peut être, en même temps, égoïste pour lui-même et altruiste pour son équipe. Pire encore, si le joueur agit sans considérer les autres, au détriment de l’équipe, jusqu’à la faire perdre, il sera exclu de l’équipe.

Le monde dans lequel nous vivons est de plus en plus riche. Et dans le même temps, la population est de plus en plus pauvre. Mais les conséquences ne se limitent pas à une augmentation de la pauvreté. On nous demande, en effet, de contribuer à un nous, mais quand ce nous y gagne, seules les personnes situées tout en haut de la pyramide tirent réellement les bénéfices de la croissance. C’est un peu comme si un joueur donnait tout pour l’équipe, qu’elle finisse par gagner, mais qu’à la fin, seuls les propriétaires de l’équipe en tirent profit, tandis que le joueur, lui, continue de s’appauvrir. Comment voulez-vous que ce joueur ait envie de faire gagner l’équipe ? On nous demande de donner au nous, de penser à l’environnement, à notre pays, à notre entreprise, mais à la fin, pour nous, c’est du sacrifice. Si, au contraire, nous pensons d’abord et exclusivement à nous-mêmes, nous avons beaucoup plus de chances d’y gagner à titre individuel. Au-delà d’une quelconque nature humaine, c’est notre système qui nous pousse à ne penser avant tout qu’à nous-mêmes, à ignorer les autres et notre environnement.

Panoptisme

Holoptisme

Pour comprendre cette difficulté, il est essentiel de revenir sur deux concepts : l’holoptisme et le panoptisme. L’holoptisme, que l’on observe dans les petits groupes, désigne la capacité de chacun à percevoir en temps réel ce qui se passe au niveau collectif. Dans une équipe de football, par exemple, chaque joueur voit le ballon, ses coéquipiers et l’équipe adverse, ce qui lui permet de prendre des décisions éclairées. Ce mode de fonctionnement favorise des décisions de haute qualité, issues de l’intelligence collective.

En revanche, à mesure que les groupes humains grandissent, cette capacité disparaît. Dans les structures pyramidales, on trouve le panoptisme : seul celui qui se situe au sommet peut avoir une vue d’ensemble, bien que partielle et parfois distante des réalités locales. Cette centralisation de l’information, où chaque échelon transmet des données à un niveau supérieur, était nécessaire pour pallier l’absence de technologies de communication rapides. Cela a donné naissance à la figure du chef : non pas un être omnipotent, mais celui qui, grâce à cette vue d’ensemble, était le mieux placé pour décider. Pendant des millénaires, cette structure pyramidale a permis de gérer de grandes collectivités, malgré ses limites en termes d’efficacité et d’équité.

Timbres de différents pays et de différentes époques illustrant un messager à cheval.

Un bouleversement historique : Internet et l’effondrement
d’un pilier

Aujourd’hui, un événement révolutionnaire remet en cause ce pilier central du système pyramidal : l’avènement d’Internet. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, nous disposons d’un outil qui permet une circulation quasi-instantanée de l’information à une échelle mondiale. Cela redéfinit radicalement notre capacité à accéder à une vue d’ensemble, rendant obsolète l’ancienne nécessité de centraliser les décisions au sommet.

Ce changement a des répercussions profondes sur nos sociétés. Nous assistons à une remise en question sans précédent de l’autorité et des hiérarchies traditionnelles, que ce soit dans le monde du travail, les mouvements sociaux ou la vie familiale. Le concept d’horizontalité, autrefois marginal, prend désormais une connotation politique forte. De nouveaux champs disciplinaires, comme l’intelligence collective, émergent pour explorer ces transformations.

De gauche à droite : Occupy Wall Street 2011 USA, Réforme des retraites 2023 France, Los Indignados 2011 Espagne

Mais il serait naïf de croire que ces nouvelles possibilités technologiques suffisent à elles seules. Internet n’est qu’un outil. Pour que la participation populaire aux décisions collectives devienne une réalité, il faut garantir deux conditions : une transparence politique totale, en temps réel, et un accès équitable aux informations. Sans cela, toute revendication démocratique risque de passer à côté de l’essentiel.

L’urgence de repenser nos institutions

Nous sommes à un tournant de l’Histoire. Après 10 000 ans de domination des systèmes pyramidaux, nous disposons enfin des outils pour imaginer d’autres formes d’organisation, capables de combiner la force du nombre avec la qualité des décisions collectives. 

Cependant, cette transition s’accompagne de défis majeurs. La transparence politique et l’accès équitable à l’information ne sont pas encore garantis. Nos institutions, héritées d’une autre époque, peinent à s’adapter à cette nouvelle réalité. La crise que nous vivons aujourd’hui est autant une opportunité qu’un danger. Sans nouvelles structures adaptées à ces bouleversements, nous risquons de sombrer dans des systèmes inefficaces, voire autoritaires.

Face à ce défi, deux voies s’offrent à nous. Certains regardent vers le passé, rêvant d’un retour à des modes de vie plus simples, souvent idéalisés. D’autres, au contraire, voient dans ces bouleversements une opportunité unique de construire un monde meilleur, plus équitable et plus résilient. Pour cela, il ne suffit pas de remettre en question les institutions actuelles. Il faut aussi repenser nos imaginaires collectifs, et surtout nos façons de décider ensemble.

L’enjeu est colossal. Mais il est aussi porteur d’une promesse inédite dans l’histoire de l’humanité : celle de pouvoir allier le meilleur des petits groupes humains à une échelle mondiale, en utilisant la technologie comme levier pour déployer une véritable intelligence collective.

“Aux quatre niveaux – individuel, collectif, institutionnel et global – le défi majeur du leadership de notre temps est de passer de réponses réactionnelles, solutions rapides soignant les symptômes, à des réponses génératives s’adressant à la racine des questions et des problèmes systémiques.”

La Théorie U : Diriger à partir du futur émergent, Otto Scharmer

Une invitation à l’action

Bien-sûr, ces outils ne se suffisent pas à eux-mêmes. C’est à nous de les utiliser pour créer un monde où la coopération prime sur la compétition, où chacun peut participer pleinement à la vie politique et sociale. La question n’est pas seulement technologique, elle est profondément humaine : sommes-nous prêts à réinventer nos institutions, nos imaginaires et nos modes de décision ?

C’est le moment d’agir. Ce qui était autrefois une utopie devient aujourd’hui possible : construire une société où l’intérêt individuel s’aligne avec l’intérêt collectif. Les Égoïstes Associés proposent d’accompagner ce changement, en repensant nos modes d’organisation et en imaginant une coopération à grande échelle. Êtes-vous prêts à redéfinir les règles du jeu ?

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For a fundamental principle of reciprocity.

Pour que des égoïstes puissent s’unir, il faut qu’ils aient tout à y gagner, ensemble. Longtemps, l’humanité a oscillé entre coopération et individualisme, entre petites communautés solidaires et grandes civilisations centrées sur le pouvoir. Aujourd’hui, avec des outils modernes qui décentralisent l’information et bousculent les structures traditionnelles, il est temps d’inventer la coopération à grande échelle.

Les Égoïstes Associés proposent un modèle où l’intérêt individuel et collectif s’entrelacent, pour que chacun gagne en s’engageant. Ce contrat moral est une étape vers un futur où liberté et solidarité ne s’opposent plus, mais se renforcent mutuellement.

Our statement

Quand la transparence détrône le pouvoir : comment l’explosion des échanges d’informations redessine les règles d’un jeu millénaire.

Our response

Et si la richesse se construisait sur l’entraide? Plongez dans le nouveau modèle socio-économique des Égoïstes Associés, où chaque individu se retrouve gagnant à donner aux autres ou au monde.

Our strategy

Apprendre à jouer collectif sans sacrifier l’individu. Découvrez comment dépasser l’individualisme politique et aligner intérêt individuel et collectif pour relever les défis de notre époque.

In progress…
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