labyrinthe jaune
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La Brèche – Partie I : Constats

VOLET 1/3

Il existe une brèche, un chemin révolutionnaire pour faire grandir un monde plus beau que tout ce qu’on peut imaginer.

By Rami Brahem

Avant-propos

Les travaux suivant se situent au croisement de l’action révolutionnaire et d’une recherche théorique et pratique autour d’alternatives systémiques. Mon approche relève toutefois davantage du révolutionnaire que de l’intellectuel. La méthode scientifique rigoureuse tend en effet à s’intéresser d’abord au comment, pour ensuite chercher le pourquoi, tandis que je suis parti en premier lieu d’un pourquoi, pour chercher le comment. 

La question, à mes yeux, n’est pas tant de savoir quelle approche serait la meilleure empiriquement, mais plutôt de percevoir, dans chacune, l’intérêt et les limites, ou encore de déterminer dans quels contextes chaque démarche est la plus judicieuse.

Si l’on peut considérer que comprendre l’Histoire ou le monde repose davantage sur la science que sur l’imagination, lorsqu’il s’agit de créer du nouveau, je me réfère plutôt à Castoriadis : c’est au travers d’un imaginaire radical, qui met en mouvement, que l’on peut contribuer à faire advenir une Histoire nouvelle. C’est peut-être pour cette raison que Graeber s’est étonné de découvrir, à travers son expérience personnelle, que les militants avaient une longueur d’avance sur les intellectuels en matière de création d’alternatives. Mais dans chaque cas, le pourquoi et le comment restent liés, et, comme dans presque tout, il faut jouer les équilibristes. Ou, comme le dit mieux Paulo Freire : « La pensée et l’acte forment deux pôles complémentaires qu’il ne faut pas séparer. »

En résumé, si ce qui est exposé ici peut prendre la forme d’un travail intellectuel, les conclusions proviennent en premier lieu de problématiques concrètes, rencontrées au travers de l’action révolutionnaire de terrain, issue d’un imaginaire radical.

R.B.

Constats

Préambule

En chinois, le terme de « crise » se dit Wei-Ji. Littéralement, cela se traduit par l’idée d’un moment charnière, où tout peut basculer — vers le pire comme vers le meilleur.

Nous traversons des crises majeures, d’ordre systémiques, tant sur le plan politique, que social ou environnemental. Si les crises ont toujours nourri la montée des extrêmes, un danger inédit s’ajoute à la vieille menace totalitaire. Les avancées technologiques offriront bientôt aux détenteurs du pouvoir la capacité d’exercer un contrôle quasi-absolu sur la population. Un régime totalitaire, remettant en cause l’État de droit — c’est-à-dire l’égalité des droits pour chaque citoyen — pourrait, grâce à l’intelligence artificielle et à la robotique, surveiller en permanence l’ensemble de la société et écraser toute résistance, même unie, d’une simple pression sur un bouton. Nous risquons une dystopie pire encore que celle imaginée par Orwell.

Face à cette situation, nous constatons un fossé énorme entre ce que proposent nos intellectuels les plus écoutés, comme l’ensemble de nos partis traditionnels, et les aspirations profondes que nous portons collectivement.

Il y a, de toute manière, une incohérence profonde :

— D’un côté, on nous promet un marché libre, mais qui finit par concentrer le pouvoir avec la concentration extrême des capitaux. Bientôt, plus rien ne sera possible sans passer par les « deep pocket investors », ces multi-milliardaires qui détiennent l’essentiel des richesses et imposent leurs propres règles du jeu, tout en continuant d’invoquer la liberté.

— De l’autre, on nous promet l’équité, sous la planification étatique, mais qui se trahit sous le poids d’un pouvoir central trop fort. Rapidement, ce pouvoir devient une bureaucratie qui étouffe l’initiative et les libertés, tout en fabriquant de nouvelles élites technocratiques, elles aussi corruptibles. Cette hiérarchie finit par définir les normes, orienter la redistribution, et contrôler l’investissement selon ses propres intérêts et valeurs, en continuant de se réclamer d’une prétendue bienveillance.

En France, lors du second tour de l’élection présidentielle de 2022, environ 39 % des citoyens en âge de voter — soit plus d’un tiers — n’ont exprimé aucun choix entre les deux finalistes.

Aux États-Unis, en 2024, ce sont environ 41 % des électeurs potentiels, incluant les non-inscrits, qui ne se sont pas prononcés lors du scrutin présidentiel.

 

J’avais lu chez Zibechi que la révolution aide à la naissance d’un monde nouveau, mais qu’elle ne le crée pas. Il existe déjà, à un stade embryonnaire, et il nous faut lui permettre de grandir.

Une alternative est déjà en train d’émerger. Elle fait l’alliance des opposés, en proposant un système où l’intérêt individuel et l’intérêt collectif ne sont plus antagonistes, mais peuvent au contraire se conjuguer. Cela ouvrirait la porte à une coopération non coercitive afin de résoudre les grands enjeux contemporains. Si un tel changement avait lieu à large échelle, il représenterait une rupture au moins aussi importante que celle qu’a connue l’humanité il y a 10 000 ans.

Une Histoire Nouvelle, aussi radicale, n’est jamais le fruit de l’imaginaire d’un seul individu. Elle est issue de la cohérence d’événements imprévisibles. J’essaie ici simplement de mettre en lumière ce qui est déjà là.

La plus grande rupture de l’Histoire des Civilisations

Nous vivons une rupture sans précédents que personne n’a vraiment vu arriver. 

C’est d’abord dû au fait que le phénomène est très récent. Aucun de nos anciens penseurs ou philosophes n’aurait su prévoir, à moins d’écrire de la science-fiction, qu’un jour les humains pourraient espérer partager une vue d’ensemble de leur sort. Mais si on le réalise encore si peu, c’est aussi dû à une forme d’aliénation qui persiste et qui était jusqu’ici présente dans toutes les sphères de la vie : le culte du chef. Le sujet est aussi lié à ce qui reste encore en grande partie un mystère philosophique : la raison d’être de l’État. 

Nous avons du mal à réaliser que nous sommes la première génération humaine à disposer de tels moyens d’échanges et de communication. Nous commençons à peine à prendre conscience d’à quel point internet transforme la société, et toutes les conséquences systémiques qui en découle. En comparaison, l’invention de l’imprimerie à son époque avait suffit à bouleverser le monde. Les avancées récentes sont bien plus impactantes.

Ce que nous vivons, c’est l’effondrement d’un pilier vieux de 10.000 ans qui a participé à forger tous les modes d’organisation que nous connaissons : celui de la centralisation de l’information.

Les conséquences sont nombreuses, mais celle qui est peut-être la plus déterminante, c’est que cela provoque aussi la plus importante remise en cause de l’autorité de toute l’histoire de nos civilisations. Des civilisations qui sont elles-mêmes fondées sur le respect de l’autorité.

Pour le comprendre, il faut nous intéresser au lien d’ordre presque symbiotique entre centralisation de l’information et autorité.

Un système vieux de 10.000 ans

Dans un essai, Asimov faisait remarquer que, « les anciens, qui pensaient que la Terre était plate, avaient en grande partie raison, vu leur contexte ». Depuis un angle de vue restreint, il est assez juste de considérer que la Terre est plate. Sa courbure est trop subtile pour être perçue. C’est quand on considère l’immensité réelle de la planète qu’on réalise que cette petite courbure finit par faire toute la différence, jusqu’à révéler que la Terre est bien ronde. 

Nos anciens vouaient un véritable culte du chef, qui persiste encore de nos jours, et qui était répandu dans toutes les sphères de la vie. Il ne fallait surtout pas remettre en cause l’autorité. Et ils avaient en grande partie raison, vu leur contexte.

De nos jours, une série de fausses vérités continuent d’être marquées dans l’inconscient collectif. En substance, on considère que l’homme est un loup pour l’homme. Cela participe à justifier le fait que nous avons fondamentalement besoin d’un chef. Sans ça, ce serait le chaos. Et étant donné cette nature ingrate que nous avons de vouloir dominer et exploiter les autres, ce chaos mènera inévitablement vers des luttes violentes de pouvoir, au travers de rapports de force. De ces conflits émergeront des dominants et des dominés. Les dominants pourront se réunir en classe sociale et établir un nouvel ordre, une forme d’État, mis en place comme instrument de domination pour préserver cet ordre établi. 

Cette lecture de l’Histoire, nous le savons aujourd’hui, est fausse.

Certes, l’homme peut être des plus égoïstes, mais il est aussi capable d’altruisme. Et aux origines, l’humanité fonctionnait sans avoir besoin d’un maître.

Dans la société contre l’État, Clastres remet en question la vision marxiste selon laquelle l’État ne serait qu’un instrument de domination mis en place par une classe dominante. Si c’était le cas, l’émergence de l’État supposerait la préexistence de classes sociales déjà hiérarchisées. Mais chez les tribus Tupi-Guarani, Clastres observe une société sans État dont la structure empêche l’émergence d’un pouvoir pyramidal. L’État n’apparaît pas à cause de classes sociales, mais en réponse à des crises collectives qui amènent ces petites tribus à avoir besoin de se rassembler en plus grand nombre. Et ce n’est qu’après l’institution d’un pouvoir centralisé qu’on voit apparaître une culture propre aux dominants, et qui les favorise. Autrement dit, ce ne serait pas tant l’exploitation qui produirait le pouvoir, mais plutôt le pouvoir qui rendrait possible l’exploitation. 

Il faut préciser que Clastres se refuse à poser un déterminisme démographique à la raison d’être de l’État. En clair, il refuse de dire que c’est le nombre qui nous oblige à avoir des maîtres. 

On peut quand même s’interroger. En petit nombre, qu’il s’agisse de nos petites tribus de chasseurs-cueilleurs ou la plupart des petits collectifs, l’humain n’éprouve pas un besoin essentiel d’avoir un maître. Il peut y avoir des maîtres, dans le bon sens du terme, c’est à dire qui ont une maîtrise reconnue dans un domaine. Mais personne ne dispose d’un pouvoir comparable à celui que nous donnons à nos dirigeants. Nous fonctionnons plutôt d’une manière qu’on peut qualifier d’horizontale*, en opposition à un fonctionnement plus pyramidal, c’est à dire avec une hiérarchie statique. Pourtant, dès que les humains ont besoin de coopérer en très grand nombre sur la durée, on constate l’institution du système pyramidal.

L’horizontalité est un sujet qui réclame de nombreuses précisions. Le terme, employé avec une connotation politique, serait apparu pour la première fois en Argentine, lors des révoltes des années 2000 (selon Marina Sitrin). Nous avons fait de même en France quelques années plus tard, sans savoir que cela avait déjà été fait auparavant. Nous voulions nous démarquer de la notion de fonctionnement démocratique, qui ne semblait pas correspondre à ce que nous vivions. Nous ignorions alors que ces fonctionnements avaient un lien avec celui de nos anciennes tribus, notamment au travers du mode d’arrêt de la décision collective employé : le consensus apparent. L’horizontalité est de manière générale très différente de toutes les démocraties qui ont pu exister à ce jour, même en termes philosophiques. Les démocraties restent des incarnations d’un système fondamentalement pyramidal. La différence entre une démocratie et un régime autoritaire ne tient pas au fait que le pouvoir ne serait plus concentré en haut de la pyramide, mais dans l’existence — ou non — de contre-pouvoirs face au pouvoir. Les démocraties sont en quelque sorte des contre-mesures face à un danger qui mène généralement aux pires dérives : celui d’un pouvoir unique, laissé libre, sans contrôle, sans surveillance, ou même sans avoir de cadre. Montesquieu, qui a théorisé la séparation des pouvoirs, le disait ainsi : « Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser… Il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. »

Ce que l’on considère comme la plus grande rupture de l’histoire de l’humanité, c’est ce moment où les humains ont changé radicalement leur manière de fonctionner en groupe. Cela s’est répandu presque partout, dans un laps de temps très court au regard de l’Histoire, il y a près de 10.000 ans. Les petites tribus sont devenues plus sédentaires, elles se sont rassemblées. On constate alors l’institution d’un système pyramidal, une forme d’État, qui nous a mené à bâtir des civilisations.

Pourquoi ce besoin d’un chef se fait si pressant alors que nous nous organisons en plus grand nombre ? Est-il systématiquement le mieux placé pour prendre toutes les décisions liées à la collectivité ?

Tout général sait que l’information est le premier enjeu stratégique.

Lorsque nous avons redécouvert les fonctionnements horizontaux, nous avons bien compris l’importance de l’accès à l’information pour que l’horizontalité fonctionne. En petit nombre, le nouveau champ disciplinaire de l’intelligence collective décrit une caractéristique dont nous disposons naturellement : l’holoptisme. En résumé, c’est la capacité pour chaque individu de percevoir, en temps réel, ce qui se passe au sein de l’ensemble de sa collectivité. Un peu comme un joueur de foot est capable de voir l’ensemble du terrain, l’emplacement du ballon et les autres joueurs. Et c’est justement parce qu’il a cette capacité qu’il est le mieux placé pour savoir quoi faire de ses talents quand la balle est à ses pieds. 

Panoptisme

Holoptisme

Quand la collectivité devient trop importante en nombre, ou qu’on s’éloigne géographiquement, nous perdons cette capacité naturelle. Nous ne savons pas ce qui se passe à l’autre bout de la ville. 

Hors, quelle que soit votre intelligence, votre expérience, ou votre talent, vous ne pourrez pas gagner la partie d’échecs si vous ne pouvez pas savoir ce qui se passe sur l’échiquier alors que votre adversaire le peut. Tout général sait que l’information est le premier enjeu stratégique. Et c’est probablement ce qui a donné sa plus grande légitimité au chef depuis la naissance de nos civilisations.

Pour nous organiser en nombre, sans moyens technologiques, et parce qu’il fallait avoir cette vue d’ensemble pour avoir autorité à décider, nous avons inventé la centralisation de l’information : je passe l’information à une échelon hiérarchique supérieur, qui fera de même, jusqu’à arriver en haut de la hiérarchie. On voit déjà un lien évident entre centralisation de l’information et autorité : sans hiérarchie, il ne peut pas y avoir une telle centralisation de l’information. 

Le résultat est que la personne située en haut de la pyramide est la seule à avoir une vue d’ensemble de cette dernière. Plus précisément, j’en sais plus que mon patron de ce qui se passe dans mon secteur d’activité, mais moins que lui de ce qui se passe dans un autre. On appelle ça le panoptisme. C’est l’image de la montagne : en haut de la montagne, je peux voir toute la montagne, mais je ne vois pas bien les détails qui sont en bas. En bas de la montagne, je vois bien l’arbuste à côté de moi, mais je ne sais pas ce qui se passe de l’autre côté de la montagne.

Pendant 10.000 ans, le chef était la seule personne à bénéficier de la vue d’ensemble.  Il était donc mécaniquement le mieux placer pour décider. Et le pouvoir s’est bâti sur ce monopole de l’information. 

L’humanité découvre aujourd’hui des moyens technologiques qui nous permettent de communiquer, presque en temps réel, avec un grand nombre d’individus, tous types d’informations. Nous observons alors la renaissance de l’horizontalité, d’abord au niveau des rapports sociaux puis dans nos mouvements sociaux et le monde associatif, avant de se répandre jusque dans les nouvelles formes d’organisation du travail. Nous observons aussi l’émergence d’une série de nouvelles formes d’organisation plus coopératives, et la naissance du champ disciplinaire de l’intelligence collective. Et nous vivons une crise d’ordre systémique : un rejet de plus en plus massif de l’autorité.

De gauche à droite : Occupy Wall Street 2011 USA, Los Indignados 2011 Espagne, Révolution du 14 janvier 2011 Tunis.

La transparence est souvent présentée comme notre meilleure arme contre la corruption. Mais elle est aussi un frein considérable à l’autoritarisme. Malgré tout, même au sein des forces qui se proclament progressistes, beaucoup arrivent encore à s’étonner, qu’alors même que des populations commencent pour la première fois de leur existence à avoir une vue d’ensemble de l’échiquier, elles puissent avoir envie elles aussi de jouer la partie. Leurs dirigeants ne font souvent que reproduire le même autoritarisme que leurs adversaires conservateurs.

Je ne peux m’empêcher de préciser ici qu’à mes yeux, la transparence devrait être aujourd’hui la première revendication politique qui devrait nous fédérer. Elle devrait être appliquée au sein même des organisations comme pré-requis pour réclamer la confiance. Les effets boule de neige d’une réelle transparence, la plus totale possible, à la fois au niveau politique et économique, sont massifs.

Précisons que tout ceci ne signifie pas pour autant que l’horizontalité en devienne applicable en l’état à large échelle. Mais elle ouvre la porte à des alternatives systémiques qui s’en inspirent, pour peu qu’on en comprenne l’essentiel.

En résumé, nos anciens avaient en grande partie raison en vouant un culte du chef, c’est à dire en se refusant à remettre en cause l’autorité, au moins en grand nombre. Durant 10.000 ans, le chef était presque systématiquement le mieux placé pour prendre les décisions, pour la simple raison qu’il était le seul à avoir une vue d’ensemble. Le pouvoir s’est bâti sur le monopole de l’information. Mais les moyens technologiques contemporains viennent aujourd’hui remettre en question l’autorité jusque dans ses fondements. Et nous sommes la première génération humaine, de toute l’Histoire des civilisations, à vivre une telle perte de repères.

“Aux quatre niveaux – individuel, collectif, institutionnel et global – le défi majeur du leadership de notre temps est de passer de réponses réactionnelles, solutions rapides soignant les symptômes, à des réponses génératives s’adressant à la racine des questions et des problèmes systémiques.”

La Théorie U : Diriger à partir du futur émergent, Otto Scharmer

Le plus grand enjeu contemporain

En parallèle de cette crise systémique de nos civilisations, l’humanité est aujourd’hui confrontée à des crises d’une ampleur inédite : changement climatique, effondrement de la biodiversité, inégalités économiques, instabilités politiques, premier génocide live de l’histoire, etc, la liste est longue. Mais aussi, pour chaque individu une perte de repères et de sens, alors que toutes les incohérences de notre société nous sautent de plus en plus à la figure.

Ces défis sont inter-connectés et semblent trop grand pour nous. L’efficacité de réponses isolées est de plus en plus contestée. La réponse logique est d’appeler à une gouvernance mondiale, ce qui pourrait peut-être nous fournir les moyens nécessaires pour y répondre de manière coordonnée. Or beaucoup soulignent, avec raison, à la fois les dangers et les impossibilités pratiques d’une telle solution.

Mais les crises actuelles peuvent-elles seulement être résolues sans que l’humanité se mette à coopérer à plus large échelle ?

L’individualisme politique

Il y a des années maintenant, j’étais tombé sur une phrase incompréhensible : « La pratique de la palabre s’effectue dans un contexte normatif d’où l’individualisme politique est absent ». C’était dans un ouvrage de l’anthropologue Urfalino. Il avait cherché à résumer les travaux de deux autres anthropologues, Terray et Abélès, dans un ouvrage qui traitait du consensus apparent*.

*Le consensus apparent, principal mode de prise de décision collective employé dans les fonctionnements horizontaux, semble avoir été le plus répandu de toute l’Histoire de l’humanité. C’est aussi l’un des moins étudiés, des plus méconnus, et qui ressuscite fortement de nos jours. Pardonnez, mais je ne peux m’empêcher de mentionner qu’une figure intellectuelle de la gauche francophone contemporaine, Chantal Mouffe, parvient à écrire en parallèle un livre intitulé « L’illusion du consensus », où elle démontre sa totale incompréhension du sujet.

Sous l’Arbre à Palabre Africaine.

Après la lecture de la phrase d’Urfalino, je m’étais posé deux questions : 

– Qu’est ce que l’individualisme politique ? Je n’avais jamais lu, ni entendu, ces mots associés ainsi.

– Et, puisque je peux me représenter approximativement ce que ça peut vouloir dire, comment une telle chose pourrait être absente d’une société humaine ?

La portée de la phrase était ahurissante. On parlerait de la possibilité d’un contexte qui permette que chaque individu, dans ses choix individuels, se mette à agir en considérant l’intérêt de l’ensemble. C’est un niveau de coopération qui, dans le système actuel, parait tout simplement délirant. Quelque chose qui pourrait potentiellement nous aider à résoudre, pas à pas, l’ensemble des grandes crises contemporaines. 

Est-ce simplement utopique ?

En réalité, nous connaissons déjà. À petite échelle, on parle de jouer en équipe; et l’inverse n’a, à ma connaissance, jamais été nommé auparavant. Lorsque nous coopérons pour un but commun, et où dans nos choix, ce qui compte, c’est faire gagner l’ensemble. Et si possible, briller en le faisant. Mais il y a une condition essentielle pour que ce soit possible.

Lorsque les chasseurs de la tribu coopèrent, on observe une synergie positive. C’est à dire que ce qu’ils parviennent à chasser ensemble est bien supérieur à la somme de ce qu’ils pourraient amener séparément. Ensemble, ils peuvent espérer chasser un mammouth, alors que même le meilleur chasseur de la tribu, isolé, ne saurait ramener un tel équivalent de viande, même en répartissant le mammouth de manière bêtement égale. C’est le sujet étudié par le champ de l’intelligence collective, qui cherche à étudier les caractéristiques qui modulent la synergie. Le fameux 1 + 1 = 3. 

Lorsqu’ils rentrent dans la tribu avec le fruit de la chasse vient alors le moment de partager la viande. Et si tant est que le mammouth soit un minimum équitablement réparti, tous y gagnent. Ils récoltent tous, sans exceptions, plus de viande pour les leurs, que ce qu’ils auraient pu ramener en allant chasser seul.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que si le joueur peut réellement se donner pour l’équipe, c’est à la condition que, quand l’équipe gagne, il y a gagne à son tour. Ça doit être l’intérêt du joueur que de faire gagner l’équipe. L’intérêt individuel et l’intérêt collectif ne sont donc pas antagonistes, mais au contraire, ils se confondent. La clé pour permettre un contexte normatif d’où l’individualisme politique est absent, c’est une absence d’antagonisme entre intérêt individuel et intérêt collectif. Notons qu’un tel contexte n’empêche pas l’égoisme ou l’individualisme, mais permet au contraire de les subjuguer.

Dans un contexte normatif d’où l’individualisme politique est absent, il n’y a pas d’antagonisme entre intérêt individuel et intérêt collectif. 

Le système actuel nous pousse à l’individualisme politique à un stade où l’on s’imagine que c’est une nature inhérente à l’être humain. Mais c’est faux, et on le constate dans les périodes de croissance d’un pays où la répartition implique encore une amélioration des conditions de vie pour l’ensemble de la population. Lorsque le peuple retrouve sa dignité, il est d’un civisme extraordinaire.

Le monde dans lequel nous vivons n’a jamais été aussi riche. Nous n’avons jamais autant produit. Mais les populations continuent de s’appauvrir et de voir leur environnement se dégrader. Et la raison est très simple : tous les bénéfices de la croissance vont vers le haut. 

Le résultat, c’est que ce n’est dans l’intérêt de personne de donner à un tel « nous », puisque quand ce nous y gagne, les nôtres n’y gagnent rien. En conséquence, en donnant aux autres, je me sacrifie. En donnant au « nous », les miens y perdent. L’individualisme politique dans un tel contexte est nécessaire pour se préserver. Et chaque pièce sur l’échiquier sera poussée à agir dans son intérêt direct, indépendamment des conséquences plus larges.

Mais nos tribus n’avaient pas un tel problème. Elles connaissaient l’abondance. À aucun moment l’intérêt et l’individuel ne devenaient à un tel stade antagoniste.

Kropotkine décrit cette dualité en l’humain : un aspect égoiste et un aspect altruiste. Résoudre l’individualisme politique, c’est offrir la possibilité aux peuples de pouvoir être les deux en même temps. 

Nous avons sous-estimé l’importance d’une répartition suffisamment équitable, c’est à dire où, au minimum, lorsque le « nous » s’enrichit, l’ensemble des personnes qui se sont impliquées vivent une amélioration de leurs propres conditions de vie. C’est la condition première afin de pouvoir résoudre l’ensemble des grands enjeux contemporains, puisque c’est le premier pas pour ouvrir la porte à une réelle coopération à large échelle. À mes yeux, cela devrait être un fondement du monde de demain.

Les plus grands manques contemporains

Nos expériences horizontales, ainsi que l’expérimentation des nombreux outils de coopération apparus ces dernières années, ne nous ont pas apporté une, mais une multitude d’alternatives pour organiser les décisions politiques. Nous sommes aujourd’hui capables de proposer un système bien plus démocratique — au sens étymologique du terme — que les démocraties qui ont pu exister. Ces alternatives devraient bientôt émerger au grand jour. Elles sont nombreuses et elles sont inspirées de l’horizontalité, sans pour autant la calquer, puisqu’il faut adapter à chaque fois au contexte, au besoin, aux particularités culturelles, et au nombre.

Mais il nous manque encore une véritable alternative économique : une option à la fois désirable, viable et faisable. Aussi importantes et utiles soient-elles, la création de coopératives où limiter les écarts de salaires ne suffisent pas à inspirer un modèle pour une alternative économique.

Comme l’exige souvent l’émergence d’une Histoire nouvelle, nous devons transformer nos catégories de pensée. Nous distinguerons ici deux types d’économies réelles connues de l’humanité :

– Les économies du don : fondées sur la réciprocité, le lien social et l’honneur, elles fonctionnent sans hiérarchie centralisée. Elles visent une forme d’abondance partagée. Elles ont existé dans de nombreuses sociétés sans État et demeurent encore largement incomprises.

– Les économies d’extraction : fondées sur l’accaparement, la hiérarchie, la redistribution contrôlée et l’exploitation d’autrui, elles reposent sur l’accumulation au profit d’une minorité — richesses, pouvoir ou ressources. On y retrouve aussi bien les civilisations palatiales antiques que les formes modernes de capitalisme, ou de communisme étatique ou capitalisme d’État.

Un équivalent fonctionnel du communisme centralisé existait déjà aux débuts des premières civilisations. Les économies civilisationnelles les plus anciennes reposaient sur la redistribution centralisée : les surplus étaient collectés par un pouvoir central — temples, palais ou bureaucraties — puis redistribués en fonction du statut ou de la fonction des individus. Dans les deux cas, une élite administre les ressources depuis une position dominante. La différence principale réside dans la légitimation : dans l’Antiquité, l’exploitation était justifiée par un ordre cosmique ou religieux ; dans les systèmes communistes modernes, elle se présente comme un projet d’égalité, masquant souvent la hiérarchie réelle sous une idéologie d’émancipation.

Capitalisme et communisme, dans leurs formes historiques dominantes, ont en commun de confier la gestion des ressources à une élite qui impose sa domination. Ce qui change, c’est la narration : dans le capitalisme, l’exploitation est justifiée par la loi du marché et une prétendue méritocratie ; dans le communisme étatique, elle se dissimule derrière un idéal proclamé d’égalité.

Notons que cette critique vise les régimes historiques se réclamant du marxisme, et pas nécessairement la pensée de Marx lui-même. Marx concevait le communisme comme une société sans classes, sans exploitation, et dans laquelle l’État serait voué à dépérir. Il y voyait une rupture radicale avec toute économie fondée sur l’appropriation de la plus-value issue du travail d’autrui. Opposé aux constructions abstraites des socialistes utopistes, il soutenait que le communisme ne pouvait émerger que des luttes réelles et des transformations historiques concrètes.

Une nouvelle théorie de la valeur

Pour que nous puissions avoir une réelle alternative économique, nous devons la favoriser. Cela nous appelle à expérimenter et à créer des modèles qui remettent en cause non seulement l’économie telle que nous la connaissons, mais jusqu’au sens même que nous donnons à la valeur.

Il y a une phrase que j’aime employer quand j’explique l’horizontalité autour de moi. « L’essentiel pour chacun avant le superflu pour quiconque ». C’est l’un des principes implicites du consensus apparent, la principale forme de décision employée dans les fonctionnements horizontaux, et qui rejette le dogme de l’égalité de point de vue. Nous ne donnons pas la même valeur à tous les points de vue, puisque les participants n’attribuent pas eux-mêmes une même valeur à leurs propres points de vue, selon les sujets. Nous cherchons ainsi à passer de l’égalité décisionnelle à l’équité décisionnelle. Nous donnons plus d’importance à une objection forte que nous n’en donnant à une simple préférence. Nous faisons passer l’essentiel de l’un, avant le superflu de l’autre.

C’est en partant de cette idée au niveau politique pour la transposer dans une aventure économique qu’à émergé un nouveau besoin concret pour nos organisations.

Après tout, entre un verre d’eau et un diamant, qu’est-ce qui serait le plus essentiel pour vous ? Qu’est-ce qui a le plus de valeur à vos yeux ?

Notre modèle économique actuel répond à cette question par une loi générale de l’offre et de la demande, qui fixe un prix, censé refléter la valeur. Mais en réalité, c’est une question piège, puisqu’aucune réponse fixe ne peut être la bonne en toutes circonstances. La bonne réponse, c’est que ça dépend du contexte. Si vous êtes dans le désert sans avoir bu depuis des heures, vous échangeriez sans hésiter un sac de diamants contre une bouteille d’eau. À l’inverse, si vous êtes dans une grande ville sans avoir de quoi payer votre loyer, la question devient absurde.

Nous avons besoin d’une nouvelle théorie de la valeur. Le regretté David Graeber a proposé une approche radicalement différente, en élaborant une théorie anthropologique de la valeur. Il soutient que la valeur ne se résume ni au travail, ni à l’utilité, ni au prix, mais qu’elle reflète ce que les gens considèrent comme important dans une société. Elle est toujours située, façonnée par des pratiques sociales, des représentations, des obligations symboliques. La valeur, selon lui, est inséparable de ce qui structure l’imaginaire et l’action collective.

D’autres tentatives ont été faites pour mieux intégrer les coûts réels de production — humains, sociaux, écologiques — dans l’évaluation des biens. Mais tant qu’on ignore cette subjectivité fondamentale, et ce qu’elle dit de nous, ces approches restent incomplètes.

Quand nous avons décidé de passer de mouvement révolutionnaire à une forme plus entrepreneuriale afin de gagner en pouvoir et découvrir une alternative économique, nous avons été confronté en direct à l’importance de prendre en compte la subjectivité de la valeur pour mettre en oeuvre notre imaginaire radical.

Une juste reconnaissance

Dans nos mouvements, nous avions tendance à éluder la question de la reconnaissance. De nos jours, la plupart fuient le problème ou se réfugient dans l’égalitarisme. Mais cela peut vite devenir une source de tensions ou de conflits au moment de répartir les fruits du travail collectif, s’il y en a. Puisque la question de la reconnaissance est liée à la question de la répartition des fruits du travail, mais aussi au pouvoir et à la légitimité qu’on veut bien accorder à une personne.

De nos jours, rares sont les personnes qui se sentent aujourd’hui justement reconnues pour ce qu’elles apportent. Ce manque de reconnaissance des qualités et des efforts individuels, souvent nivelés vers le bas, est probablement accentué par une contradiction : d’un côté on nous vend un égalitarisme qui prétend que tous les points de vue auraient la même valeur, et de l’autre, nous vivons une médiocratie qui tend à favoriser les personnes les plus dociles vis à vis du pouvoir, au détriment des plus compétentes. Mais le manque de reconnaissance sociale se retrouve cependant aujourd’hui à tous les échelons de la société, et alimente un narcissisme qui se répand de façon préoccupante**.

** Selon le psychothérapeute Thomas Moore, Narcisse est préoccupé par sa beauté sans en avoir lui-même pleine conscience. Cette ignorance le pousse à chercher constamment la reconnaissance des autres, sans jamais pouvoir s’engager réellement dans une relation. Comme l’écrit Moore, « la manifestation d’amour-propre narcissique indique l’incapacité de s’aimer soi-même ». Sa rencontre avec la nymphe Écho, condamnée à ne lui renvoyer que ses propres paroles, illustre le vide et la stérilité de ce rapport au monde. Ce n’est qu’en se mirant dans l’eau et en prenant enfin conscience de sa propre beauté que Narcisse parvient à s’aimer lui-même, renonçant ainsi à la quête extérieure de validation. Sa mort et sa métamorphose en fleur symbolisent alors une profonde transformation intérieure : la mort de l’ego et l’épanouissement du Soi. (Wikipedia)

Nous avons besoin d’un modèle d’organisation où l’ensemble des personnes impliquées ont le sentiment de recevoir une juste reconnaissance, et d’en analyser le comment. Et nous pouvons nous servir de notre maîtrise de l’intelligence collective pour découvrir comment faire.

Il y a au moins 3 leviers pour expérimenter et découvrir une réelle alternative économique : 

– Nous devons réussir à créer des modèles d’organisation, même de petite taille, où l’ensemble des personnes impliquées ont le sentiment de recevoir une juste reconnaissance pour leurs efforts, et analyser le comment.

– Les économies du don n’ont pas été explorées suffisamment (les sites ou plateformes de « don » n’ont rien en commun avec les économies du don). Elles peuvent, après expérimentation, devenir une source d’inspiration pour l’économie aussi puissantes que peut l’être l’horizontalité pour l’organisation politique.

– Nous avons besoin d’une nouvelle théorie de la valeur. Les plus importants travaux actuellement proviennent probablement du regretté David Graeber, qui a bien senti l’importance d’une théorie anthropologique de la valeur. D’autres tentatives ont été faites, qui prennent mieux en compte les véritables coûts de production (humains, environnementaux, etc), mais elles nous apparaissent incomplètes, puisqu’aucune ne s’intéresse à la subjectivité de la valeur.

Le plus grand pouvoir contemporain

C’est un point crucial pour les forces révolutionnaires contemporaines.
Comme l’expliquent plusieurs chercheurs, dont Annie Lacroix-Riz, un basculement s’est opéré durant la seconde moitié du 20ème siècle : le pouvoir économique a progressivement pris l’ascendant sur le pouvoir politique. Aujourd’hui, le pouvoir de changer la société ne se mesure plus simplement à un mandat électif, mais à la quantité de capital qu’on contrôle.

Si les forces révolutionnaires veulent réellement libérer le pouvoir, elles devront reprendre la main sur les circuits économiques — parce que c’est là que réside aujourd’hui le véritable pouvoir. Cela implique de développer, consolider et interconnecter des contre-économies bien réelles, capables de concurrencer l’économie capitaliste dominante.

Nous devons prendre le pouvoir sur le fric, pour mieux le disperser.

Notes de fin de partie

Ce texte est la première partie d’un article en trois volets, intitulé « La Brèche ».

  • La partie 1 présente les constats.
  • La partie 2 présente les solutions que nous souhaitons mettre en oeuvre pour répondre à ces constats.
  • La partie 3 présente notre chemin pour mettre en oeuvre ces solutions.

 

Nous partageons pour la première fois l’intégralité de ces travaux en ligne. Ils sont le fruit de quinze années de travail où j’ai pu bénéficier d’une grande intelligence collective. Si vous êtes allé au bout de cette lecture, c’est que vous faites partie des rares personnes déterminées à changer les choses qui ont pu y accéder pour le moment. Je ne peux que vous inviter à rejoindre notre mailing-list pour suivre les avancées ou participer, et à nous contacter — en particulier si vous avez des désaccords.

 

Hasta la victoria siempre

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Soumaya AYADI JMOUR
Soumaya AYADI JMOUR
4 days ago

Excellent 👍 article assez pertinent et bien documenté un peu long
Si vous pouvez synthètiser, pour les personnes qui ne lisent pas tout au début.
Mettre des titres alléchants.
Bon courage et bonne continuation.

For a fundamental principle of reciprocity.

Pour que des égoïstes puissent s’unir, il faut qu’ils aient tout à y gagner, ensemble. Longtemps, l’humanité a oscillé entre coopération et individualisme, entre petites communautés solidaires et grandes civilisations centrées sur le pouvoir. Aujourd’hui, avec des outils modernes qui décentralisent l’information et bousculent les structures traditionnelles, il est temps d’inventer la coopération à grande échelle.

Les Égoïstes Associés proposent un modèle où l’intérêt individuel et collectif s’entrelacent, pour que chacun gagne en s’engageant. Ce contrat moral est une étape vers un futur où liberté et solidarité ne s’opposent plus, mais se renforcent mutuellement.

Our statement

Quand la transparence détrône le pouvoir : comment l’explosion des échanges d’informations redessine les règles d’un jeu millénaire.

Our response

Et si la richesse se construisait sur l’entraide? Plongez dans le nouveau modèle socio-économique des Égoïstes Associés, où chaque individu se retrouve gagnant à donner aux autres ou au monde.

Our strategy

Apprendre à jouer collectif sans sacrifier l’individu. Découvrez comment dépasser l’individualisme politique et aligner intérêt individuel et collectif pour relever les défis de notre époque.

In progress…
In progress…

Our statement

Quand la transparence détrône le pouvoir : comment l’explosion des échanges d’informations redessine les règles d’un jeu millénaire.

Our response

Et si la richesse se construisait sur l’entraide? Plongez dans le nouveau modèle socio-économique des Égoïstes Associés, où chaque individu se retrouve gagnant à donner aux autres ou au monde.

Notre force

Apprendre à jouer collectif sans sacrifier l’individu. Découvrez comment dépasser l’individualisme politique et aligner intérêt individuel et collectif pour relever les défis de notre époque.

Our statement

Quand la transparence détrône le pouvoir : comment l’explosion des échanges d’informations redessine les règles d’un jeu millénaire.

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Et si la richesse se construisait sur l’entraide? Plongez dans le nouveau modèle socio-économique des Égoïstes Associés, où chaque individu se retrouve gagnant à donner aux autres ou au monde.

Notre force

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